en   MOT  dièse
petite  ANTHOLOGIE  de  poésie  et  de  musique  de  chambre

de Philippe MARTINEAU

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La soupe au matou



De ville et des champs,
nos deux rats, en queue de pie,
revinrent sur le tapis
d’un meublé, rue de Longchamp.
– Réjouissons-nous, cousin,
depuis quatre-vingt-un
tous les chats sont partis
et les chattes, tenues en laisse :
les trotte-menu de notre espèce
ont leur quiétude garantie.
Rien ne saurait plus corrompre l’aise de ronger en chœur,
ni jamais interrompre le clapotis des cœurs.
Et pour jouir de l’atout,
je nous ai fait livrer par le traiteur une soupe au matou !
Goûtons-en les prémices
avant que d’ôter le couvercle.

À s’imaginer le délice
nos gens se dilatent le cercle
de tous les orifices.
Et d’être en passe de croquer la cause
de leur antique frousse
fait que rognons leur poussent !
et vainquent l’andropause...
– Tiens, j’entends comme un ronron...
– Grands dieux ! c’est impossible.
Reprenez-vous, poltron,
car insister serait risible.
– Pourtant, ce bruit... provenant de la soupe...
– Rumeur de fable, allons !
que ne changez-vous d’ouie pour recouvrer l’aplomb ?
et qu’on voie à la loupe
ce qui vous rend anxieux !
et sans plus de délai,
que ce mets délicieux
fasse de nos palais
l’antichambre des cieux.

On ouvre la soupière...
mais le chat n’est pas cuit !
et happant les compères
en croque le Q.I.,
qu’aisément il digère
tant la chose est légère...
Méfiez-vous des vendeurs de soupe au chat, Messires !
car certains n’ont pas peur d’oublier de l’occire...
et que peut faire un chat dont nul ne rompt le cou,
sinon au fond du plat mijoter ce bon coup ?


in « Pique-nique chez La Fontaine » - édition 2005


par Martine MARCHAND :
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